Il est bien vrai que la pr ésentation de TRACES, d'une part est perfectible, de l'autre que (lorsque je le réalise moi-même, de bout en bout-et en dépit de seize heures d'activités quotidiennes diverses-) faisant tout, matériellement, seul, je ne pourrai jamais, réellement mieux...avant la retraite (si j'y arrive en état de marche !). Car il reste un point majeur: certains ont de belles revues, car ils en ont les moyens. Belles revues = bons revenus. Et d'un. D'autres font de belles revues parce qu'ils ont le temps devant eux et sortent des numéros comme des estampes : peu. Je ne veux pas affirmer que l'homme au foyer n'a rien à faire mais, quand l'épouse a un job qui lui permet de soutenir son époux sculpteur, potier, poète-artisan, cela ne manque pas d'avantages… pour lui. Si, avec ça ; ses productions sont cochonnées, il n'y a plus qu'à tirer l'échelle, naturellement, même avec du temps libre, n'est pas Vodaine ou Thomas qui veut, (il en est qui acceptent des sacrifices sur leur train de vie pour assumer leur choix d’artiste. C’est le cas d'Edmond, pour ce que j'en sais. Je les salue bas.). Le « ras le bol des potereaux » prononcé par P Perrin, dans POSSIBLE -que je ne reçois plus, non plus que PLEIN CHANT- où l'on vouerait réduire les revues a une dizaine mais solides" ? De toute manière, les poètes, justement, sont une engeance opposée au centralisme d’où qu’il vienne.
Il n’y a pas plus d’ « école TRACES-LAVAUR » que d'école de Rochefort, mais une audace, en ce qui me concerne, commune aux enfants du petit peuple qui ne sont pas nés trop résignas ni trop maladroits, de ne pas accepter leur sort: suer et se taire. Le titre de TRACES aurait pu être « Les moyens du bord » (j ’ai projeté de le donner à une manière d'hommage anthologique à ces petites revues ; je le ferai peut-être...). C'est le fond du problème. Chacun (et je suis heureux d'ajouter « chacune », pensant à THELEME, LE PETIT JOURNAL, ON ESSAYE...) invente à partir des coordonnées qui sont les siennes. (Ma femme, qui sait de quoi elle parle car, son salaire + le mien + nos travaux dans le logis et autour sont in dispensables au paiement des traites de notre maison... et du reste, on m’a souvent dit que, s'il y avait peu de femmes faiseuses de revues, c'est qu'elles ont moins de temps que les hommes. ) » Je viens de l’appeler, pour lui faire lire ce passage : j'ai eu droit à une bise ! ».
La presse à épreuves de Delahaye, aussi, jadis, faisait sourire certains. Moi, j'aime. Oui, à chacun son outil, et la poésie reconnaîtra les siens. De Cornière prend la photocopie ; Chambard, la presse à pédale ; Pajot, la duplication à l'alcool ; Le Mauve fit un recueil gravé sur linos ; Seyve, la presse à épreuves, comme H-S. Fauro fit son CADRAN LUNAIRE à la ronéo ; LAVAUR, les premiers TRACES sur une presse scolaire Freinet...
Je suis peut-être le second à avoir fait une revue sur stencil électronique : La Corde d’Airain avait -sauf défaut d'information de ma part- sorti, dès 62 ( en janvier 63, c'est sûr ) les premiers exemplaires selon ce procédé.
En revanche, je dois être le premier - le seul, j'espère, car c’est dangereux- à avoir réalise une couverture polychrome au trichloréthylène.
J'avoue la béate admiration que je porte à LA SAPE ou à SOLAIRE , bel et imposant objet de typo ; à l'offset charpenté et solide de JUNGLE ; 25 ; CRAYON NOIR ; aux trouvailles de mise en page de DIRE et 27, mais j'attends beaucoup..des obscurs qui ne sont pas du m é tier (comme Thomas, Marjan, Guinhut, Rougerie...) parce qu'ils doivent inventer, lutter avec la matière... et vendre leurs œuvres ! C'est en cela qu'ils m é ritent le nom de poètes/artisans, lion que leur travail d'imprimeurs/ éditeurs -et c'est un mal nécessaire car il conditionne leur indépendance - les nourrisse, mais leurs publications vivent de leur travail.
Je n'ignore pas que, pour livrer une revue propre, je devrais taper en entier chaque page avant de passer au stencil. Pas le temps. Je me contente d'une maquette pr é cise. Pire, beaucoup de mes textes ont été tapés en direct : je rédige en même temps que je perfore le stencil, ce qui donne un piment particulier quand, involontairement, je frappe, à propos de la Tour de Feu, « ç a bouje là -dedans ». Ça compense, peut-être, l'aspect un peu raide de certains de mes propos, préfaces, articles très raturés et mis en forme avant d' être placés sur la machine à écrire ou la casse Mon idée d'avoir une pareille désinvolture à
l' égard du lecteur ? Et pourtant, je m'amuse, quand d'autres le font, eux aussi, à L ' ECCHYMOSE, à ESSAIS ( J. Guign é , lui,
y glissait surabondamment des fautes d’orthographe ou de syntaxe, pour faire plus direct encore ! ), ou PILON...
Alors, Louis, mea culpa, j'ai donne le mauvais exemple. Thomas a donn é le bon. Et si les deux é taient n é cessaires ? A vous de choisir une formule qui vous convienne.
Je ne vous écris que ceci : si vous avez quelque chose à dire (notez cependant, que j’ai toujours, en parallèle, en revanche, ou en compensation, publié des poèmes qui étaient aboutis sur le plan de l’écriture : là, à mon sens, l’artisanat -celui d’écrire- ne souffre pas la médiocrité) n’attendez pas pour essayer : astuce + huile de coude + quelques économies et osez ! Il y a parmi vous des marginaux des oubliés, qui feront de la presse parallèle (SIC et DIRE y ont force d’exemple).
MFL (mars 1980)