La nuit se lève
La nuit se lève. La parcourent des visages masqués.
Le vert rituel s'émancipe aux talons des labours.
Heures où les sentes bifurquent et se suicident dans l'eau claire. Une étoile fléchit. L'été l'inonde par saccades. L'ombre s'adosse aux murailles. I.cs gorges remuent leurs vases.
Le corps s'endort dans la chaleur des lampes.
Heures douces. Fruits calmes. Ivoire du grillon sous la voûte du chêne. Luzernes saignantes, girolles indécises, et ces cris de lumières
La lune me distance. L'ombre déploie ses herbes magnifiques : Rosés-pivoines, marguerites lichens, misère-angélique. D'autres herbes : hcrbes-aux-chats, herbes aux longs doigts, herbes folles, architectes, herbes savantes, inutiles
J'accueille les jonchées. J'enlace leur sommeil.
Je froisse le rideau du contrôle.
Le silence glapit. L'ombre du fossé crache la peur. Sous l'orme, une source s'égare, un nuage cache l'oubli. Formes de la nuit d'où glissent l'algue marine, le ramier cascadeur et la couleuvre lisse. Sommeil roux, sillons lavés, vieux bois
Poèmes de chair, de craie, tracassés de douleurs.
Josette Barny
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La nuit
Parées pour d'infernales rondes
Immanentes
Étrangères aux querelles des chemins
Visibles,
mais ternes
L'inceste du baiser
retrempe l'audace
et la souplesse de la nuit
Nuit plurielle, plurivalente
Hôte, gîte de l'éclair, de la brisure
Arme,
fière !
Soumets au doute l'apparence
à la vigueur,
le mystère
à l'innocence, la liesse
Nuit feinte
pacifiée
Coque, bogue de l'impossible étreinte !
Nuit totale
Épaisse, tendue, aux reliefs sonores
Nuit sans complaisance
Une vieille malice anime les lèvres
arc-boute une jambe, détourne un œil
Les rites de la douleur ameublissent l'interminable absence
Noir et sans bruitage,
le sang de l'effusion.
Étoiles, farouches univers, la beauté dont la lumière vous pare est d'outre-ciel, et vous n'habitez pas notre sol, sauf parfois à l'aube, pour quelques gouttes de rosée.
Jamais le soir, lorsque les yeux se lèvent, et que les mains se tendent pour d'autres dimensions.
Josette Barny
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