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Sommaire numéro 68
automne 1982

Autour de Jean Spéranza
par Armand Olivennes



Dessin de couverture de Renée Leclerc

 

 

 

pages I et 2 ( + 35 et 36 ) : Jean Laroche
p. 3: sommaire
p. 4 : la presse et nous;
p.5/6/31/32: Claude Serreau
p. 7: Jean-Claude Celly, Pierre Bazin, Bernard Sage
p.8: Geneviève Thévenet
p. 9l Michel-François Lavaur
p. 10 et 11: Jean-Claude Walter
p. 12: Alain Ferey
p.12 Norbert Lelubre
p.15: à 20: présentation de Jean Spéranza par
Armand Olivennes
p.21 à 24 + troisième page de couverture : textes de Jean Spéranza
p. 25 à 27: écritiques, puis: je de mots de Lavaur
p. 28: Philippe Landreau et Odile Caradec:
p. 31 et 32: claude serreau
p. 35: Alain Lebeau
p.36: Raymond Farina

couverture: dessin Renée leclerc
p. 2 de couverture: catalogue succinct

Autour de Lavaur , oeuvre une d'équîpe de soutiens Victor Etcheverry, Alain Lebeau, Claude Serreau, Nobert Lelubre, Simonomis, Raoul Pérol, Jacques Souchu.


Extraits de la revue


Le loup

Certains soirs, la fatigue ouvre des pans d'angoisse aux murs de la chaumine.

La disette a scellé sur toute la contrée, du pays bas jusqu'au plateau où s'ancre la masure, les fers d'un désespoir plus noir que cette nuit d'hiver dur et tenace.

Le garçon ne dort pas. Il écoute. Il hume. Il attend comme une catastrophe ; la chute du chêne qui veille au pignon ; l'assaut du démon par toutes les fentes, dans une furie de vent et de neige...

D'ordinaire, les bruits et les parfums le veillent. A travers la cloison qui borde sa paillasse, il savoure l'odeur de la litière fraîche et même le fumier, pour lui, est arôme de paix tendre et sûre. La chèvre éternue, elle mâche les feuilles. L'âne tire le foin de son râtelier, il se gratte, s'ébroue.
Et cette arche d'échos et d'accords dans les sons, les senteurs, l'ensommeille.

Maintenant, alentour, tout lui paraît hostile. Le cri d'effraie se fiche comme un dard de l'effroi sous les ongles.

La peur, la faim, le froid le prennent à la gorge.

II va crier, éclater en sanglots.

Pourtant, quand monte du ravin le hurlement sinistre, au lieu de céder à cette panique qui vient du plus profond des terreurs ancestrales, il trouve soudain comme une quiétude, serré dans ses guenilles, le menton aux genoux sous sa couverture, par la seule vertu de la maison natale qui toujours l'a protégé du loup.

Michel-François Lavaur (Argos 5)


Quelques textes de Jean Spéranza


Jean Spéranza est de ceux qui ont combattu pour le langage poétique, en usant de la métaphore, en la pratiquant jusqu' à la dérision du conjugué , jusqu' à la dénonciation de l’opacité que la prose fait stagner, comme un salut,
un culte voué aux victimes de l'irréel, comme altérité de la parole et parole de l'altérité .

Armand Olivennes


ils ont fait la guerre aux feuilles
là-bas
si loin
que mes mots jamais n'y parviendront
ou si fatigués si usés de poussière
que personne ne les reconnaîtra

là-bas
peut-être n'ai-je pas le droit
de fermer mes yeux
pour voir grandir les feuilles
mais comment refuser
au peuple sous les arbres
la fraternité des ombrages retrouvés

ils ont fait la guerre aux feuilles
et voilà enfin que je me couche
au piôd d'un olivier chez moi
déjà comme un cadavre pour ne plus oublier.


La justice en prêt à porter
sur une plage du dimanche
changeable suivant l'hiver
et l'été

les oiseaux se noient
dans le ciel bleu des piscines
les oiseaux ne perdent pas leurs plumes
quand souffle le vent des révoltes

tu apprendras à lire
sur le marbre des cimetières
à chaque hésitation
un nouveau nom sera gravé

les oiseaux ne savent plus construire
leurs nids
ils logent dans des hôtels borgnes

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